13-07-2010

Je pars avec trois jours de retard mardi 6 juillet. Il a plu sans arrêt, avec un vent glacial. Je me suis isolé pour préparer mon vélo dans la maison de Jeannette qui est partie en vacances. J’en avais besoin au bout de deux mois en communauté. Je prends la route, les jambes rouillées, le vélo chargé de plus de deux semaines de nourriture, pâtes et thon…sans oublier un pot de Nutella. Le vent est de face, et il faut slalomer entre les flaques de boue qui inondent la piste vers Marble Bar, mais aussi se réhabituer physiquement. Je manque de rouler sur un serpent, dont je ne connais pas encore l’espèce. Le premier jour est court, une quarantaine de kilomètres, je m’arrête aux Coogan gorges, j’ai vraiment apprécié être en mouvement à nouveau. Le deuxième jour je rejoins rapidement Marble Bar, et sur le chemin j’ai pu croiser Clarrie qui revenait vers Warralong en famille, mais aussi des gens de Punmu qui m’ont reconnus. Je quitte Marble bar sous le soleil enfin, en direction de Punmu, qui se trouve environ à 400 kms. J’ai pris suffisamment d’eau pour atteindre la mine de Telfer, 150 kms avant Punmu.

Les voitures sont rares, généralement des voyageurs qui se lancent à l’aventure du désert en 4x4, je vois principalement des Road-trains qui font le lien entre Port Hedland et Telfer pour acheminer le minerai. Les deux jours suivant sont éprouvants pour les jambes, mais l’endurance revient peu à peu, le vent souffle sans discontinuer. J’essaie de ne pas penser à ma vitesse réduite, je roule et je ne m’arrête que pour manger et dormir. Les paysages changent peu, juste de lointaines montagnes rouges et rocailleuses en leur sommet, recouvertes de spinifex. Je croise plusieurs voitures remplies de joueurs de Footy de Punmu qui se rendent à Warralong pour le carnaval qui aura lieu en fin de semaine. Ils s’arrêtent tous pour discuter un peu, ça fait du bien. Je suis visiblement attendu par toute la communauté.

Le jour suivant le vent s’inverse, les voitures se font rares, je roule à bonne vitesse et l’horizon s’élargi. Je vais bientôt arriver au tournant qui mène vers la mine de Telfer, là où la route devient non goudronnée. La voie est bloquée et des camions sont parqués, mais personne alentour. Je décide de continuer, je n’ai pas assez d’eau pour m’arrêter trop longtemps. La piste est large et lisse, maintenue pour les camions. Je m’arrête pour camper près d’un des rares arbres où je peux appuyer mon vélo. Les nuits depuis mon départ sont paisibles mais glaciales, et je me réveille souvent. Je dors 11h par nuit cela dit, mon corps se réhabitue à l’effort. Le jour suivant je parcours la deuxième moitié de la piste avant Telfer, le vent souffle à nouveau de face, juste une longue ligne droite rouge et boueuse par endroit, horizon plat et désertique, quelques rares camions soulèvent un nuage de poussière derrière eux qui me recouvre au passage pendant plusieurs minutes. Parfois des 4x4 de voyageurs s’arrêtent pour me demander ce que je fais là et me prendre en photo. Ils proposent toujours de l’eau ou de la nourriture. En fin de journée, avant d’arriver au virage qui mène à la mine, je m’arrête auprès d’une éolienne qui pompe de l’eau apparemment propre à la consommation, je tente le coup ça me fera économiser un détour de 60 kms pour remplir mes bidons à Telfer. Je m’arrête pour la nuit juste après m’être engagé dans les derniers 150 kms avant Punmu. Au petit matin, le vent a légèrement diminué, et je démarre ma journée sur une surface sableuse molle. La couleur rouge saturée du sable hypnotise et empêche de voir les reliefs et d’éviter les bosses. La matinée est paisible, j’entends seulement la friction de mes roues sur le sable fin, et ma tasse en émail attachée à l’arrière. Le sable laisse place parfois à un sol rocheux cassé et blanc, parfois des graviers pointus sur un sol mou et ondulé. Je progresse difficilement je dois avoir les yeux sans cesse rivés sur la piste pour éviter les trous ou rochers. C’est mon 6ème jour de route, je n’ai toujours pas vu d’habitations depuis Marble Bar. Je suis à présent en plein coeur du Great Sandy Desert, et la piste droite serpente le long de deux dunes de chaque côté, longues de plusieurs dizaines ou centaines de kilomètres. Toutes ces dunes sur une surface immenses sont toutes orientées nord/ouest sud/est, d’une hauteur de 10 à 20 mètres.

Le dernier jour il me reste 75 kms à parcourir, à trois reprises des groupes de dromadaires sauvages qui suivent la piste en quête d’eau s’enfuient à ma venue. Je recroise à nouveau Nick, connu sous le nom de X-men - car il ressemble à Hugh Jackman – qui m’invite à venir chez lui quand j’arrive à Punmu. Je l’avais déjà rencontré au carnaval et il attendait ma venue. Dans les derniers 30 kms je tombe sur une voiture en panne, une famille aborigène est en panne de batterie, les enfants jouent nus sur le bas côté. Je promets d’envoyer de l’aide dès mon arrivée.

A ma droite j’aperçois enfin le lac Dora, immense étendue blanche asséchée qui annonce mon arrivée. Je passe trois dernières dunes avec difficulté avant de voir Punmu au milieu du désert immense. Nous sommes lundi 12 juillet. Je rentre dans la communauté par le terrain de foot où nous avions campé, et au passage je m’embourbe dans le sable, je dois pousser pour le dernier kilomètre. Pour ce soir je me console avec un gâteau et un bon lit qu’X-men a préparé pour moi… après 7 jours isolé, 500 kms dont la moitié non goudronnée.

I leave with three days late on Tuesday the 6th. It rains continuously, with a chilly wind. I stay on my own to prepare my bike in Jeannette’s house that is gone in holidays. I needed it after two months sharing my space. I go on road, with rusty thighs, the bike loaded with more than two weeks of food, pasta and tuna… without forgetting a jar of Nutella. There is a head wind, and I have to zigzag between muddy ponds which flood the track toward Marble Bar, but also to get use to it again physically. I miss a snake on my way; I don’t know yet which specie it is. The first day is short, forty kilometers, I stop at the Coogan gorges, and I really appreciated to be on the move again. The second day I reached quickly Marble Bar, and on the way I met Clarrie who came back to Warralong with the family, but also some people from Punmu who recognized me. The sun appears as I leave Marble Bar, towards Punmu, about 400 kms ahead. I took enough water to reach Telfer Mine, 150 kms before Punmu.

The cars are rare; in general travelers going to some desert adventures in 4wd, I see mainly road-trains which link Telfer to Port Hedland to bring ore. The two following days are exhausting for my legs, but my endurance is coming back slowly, the wind blows continuously. I try to don’t think about my low speed, I ride and stop only for sleeping and eating. The scenery doesn’t change so much, only some far red mountains, rocky on the summit, covered by spinifex. I encounter few cars full of footy players heading to Warralong for the carnival end of the week. They stop to discuss a bit with me, it’s good to have a chat sometimes in a day. I am apparently expected by the all community.

The following day the wind changes to the opposite direction, cars get rare, I cycle at a good speed and the horizon gets wider. I will arrive soon at the turn off which goes to Telfer mine, the road becomes rough. The way is blocked and some trucks are parked but nobody is around. I decide to continue, I don’t have enough water to stop too long. The track is wide and smooth, maintained for trucks. I stop to camp close to one of the only trees where I can lean my bike. The nights are peaceful since my departure but really cold, I often wake up. I sleep 11h a night; my body gets use to effort again. The following day I ride half of the track before Telfer, the wind is facing me again, just a long red stretch, muddy sometimes, flat and desert horizon, few trucks head a large dusty cloud which cover me for minutes when they pass me. Sometimes the 4wd stop to ask me what I am doing here and they take a photo. They propose some food or water. At the end of the day, before arriving at the turn to the mine, I stop close to a windmill with a water tank, apparently clean. I try and fill my jerry cans, I avoid 60 kms extra instead of going to Telfer. Just after heading to the last 150 kms, I stop for the night. In the morning, the wind decreased, and I start my day on a soft sandy surface. The red saturated color of the sand is hypnotic, and twists your vision by not seeing holes and corrugations. The morning is peaceful, I only hear the friction of my tires on the fine sand, and my Billy cup attached at the back. Sometimes the sand gives place to a white rocky broken ground, sometimes sharp gravels on soft ground. I progress slowly, I have to stare all the time at the road to avoid holes or rocks. This is my 6th day on the road, I haven’t seen any habitations since Marble Bar. I am now in the heart of the Great Sandy Desert, and the straight track goes along two dunes on each side, tens or hundreds of kilometers long. All of those dunes on a huge surface are orientated North/West South/Est, 10 to 20 meters high.

The last day, I have 75 kms to go, by three times some groups of wild camels who follow the track escape when I reach them. I meet again Nick, aka X-men – because he looks like Hugh Jackman – who invites me in his place when I get to Punmu. I met him before at the carnival. In the last 30 kms I see a car stopped in the middle of the way, an aboriginal family with a flat battery, some naked kids are playing on the bank of the road. I promise to send some help when I arrive.

To my left I can see the Lake Dora, huge white dry surface beside Punmu. I climb three last dunes with difficulties and I can see the community in the middle of the desert. We are Monday July the 12th. I enter the community by the footy field where we camped, and I get stuck in the sand, I have to push the last kilometer. For tonight I get a chocolate cake and a comfortable bed in X-men’s house… after 7 isolated days, 500 kms, half of them rough.